Le 30 novembre 2022
Pour ce sujet « Entreprendre » sur Lilo Nectar, qu’on ne s’y trompe pas ; nous n’allons pas vous expliquer par le menu comment on monte une activité d’apiculteur. Ni celle de transformateur de miel en confiserie et chocolaterie. Nous ne vous donnerons pas le mode opérationnel d’une création de micro brasserie. Et pas mieux le détail de la reconversation paysanne d’un jeune ingénieur bois. Nous allons plutôt vous raconter ce qui nous a séduit dans la démarche de ce jeune couple, Vincent et Laurine, entrepreneurs au milieu de leur trentaine. D’abord approchés pour leur gite charmant, dont la verrière d’accueil était joliment bricolée et meublée de récup’, nous sommes allés de surprise en surprise. Lilo Nectar, tour d’horizon des multiples activités de ce couple de trentenaires.
Le bain nordique sur la terrasse du gite Lilo Nectar ? L’aboutissement de tests après un premier prototype fabriqué dans une cuve de bois pour le vin.
Le plancher de chêne ? Un travail de menuisier à partir des bois extraits de la forêt par son grand père et lui, il y a 15 ans.
Le hamac accroché au salon ? L’occasion de revenir sur l’agriculture en Guyane, où ils ont habité 3 ans. Laurine, passionnée d’agriculture et Vincent, alors responsable production de charpente d’une grande entreprise, ont entretenu un hectare de verger et une production sous serre, avec l’aide de woofers. Elle à la culture, lui à l’entretien des machines.
Le champ de lavande devant la terrasse ? Il fut planté pour nourrir les abeilles des 200 ruches, des dizaines d’arbres en émergent, qu’on laisse pousser librement dans une démarche d’agroforesterie, un autre de leurs centres d’intérêt. Ils sont d’ailleurs revenus de Guyane avec un documentaire sur le sujet, tourné avec un appareil reflex. Pour le réaliser, Vincent avait appris la technique photographique.
Mais bon tout ça c’est de l’histoire ancienne. Aujourd’hui, à Lilo Nectar, Vincent s’intéresse plutôt à la culture de houblon qu’il utilisera dans sa production de bière et à l’aménagement de son atelier de produits dérivés du miel et de micro-brasserie qui accueillera du public.
La démarche entrepreneuriale de Vincent et Laurine est guidée et nourrie par leurs envies.
Comme ce sont des gourmands de la vie, des curieux, on pourrait avoir l’impression qu’ils vont dans tous les sens. Qu’on ne s’y trompe pas, cette multiplicité de centres d’intérêts et de réalisations n’est pas anarchique. Ils ont une vision globale de leur activité professionnelle sur le court et le moyen terme (à 15 ans). Certes, l’activité de Lilo Nectar doit être rémunératrice : elle doit leur permettre de vivre bien et d’élever leurs enfants – ils ont deux garçons – sans être dans le manque. Mais surtout, leur vie professionnelle est exactement la vie qu’ils veulent mener.
A Lilo Nectar, des tempéraments, qui se ressemblent et se complètent
Ils sont devenus sédentaires après des années de voyage. Lui dès l’enfance par le travail de son père, souvent expatrié, elle à la vingtaine par une bougeotte qu’elle peut enfin concrétiser. Alors qu’ils étaient déjà ensemble, elle lui aurait posé un ultimatum : – je continue avec toi si on part à l’étranger. – D’accord, a-t-il répondu, si on y parle français. Mayotte ou la Guyane ? Ce sera la Guyane, dont le climat et la terre sont plus adaptés au travail agricole, un intérêt central de Laurine.. Elle se fait la main sur le sol d’outre-mer en même temps qu’elle prépare le CAPES. Apres un passage à l’INRA elle revient comme enseignante en agronomie au lycée professionnel agricole de Brioude-Bonnefont où elle fut élève, la fibre pédagogique en plus de l’agronomique.
Laurine n’aime pas les lignes droites, raconte son époux, ça se voit dans le jardin : on a planté sur des courbes 700 arbres dont 80 fruitiers et une haie arborée… « Ma femme est très rêveuse, elle lance des idées et j’ai envie de les concrétiser… »
Vincent est un faiseur qui carbure aux projets et à la résolution de problèmes. En creusant, on apprend qu’il a été décelé quelque chose comme multipotentiel lorsqu’il était en classe de 3ème. Cela ne nous surprend pas. il fait partie de ces personnalités qui ont besoin de conduire de front plusieurs choses à la fois, de découvrir, d’apprendre, d’expérimenter… sinon elles s’ennuient. Dans une société où l’on incite plutôt à se spécialiser, pas facile d’être un salarié avec un tel profil. Son travail en bureau d’études de découpes de panneaux industriels ne l’a pas passionné, le management ne lui convenait pas non plus. Lorsqu’en 2016 le couple investit dans une maison avec 4 hectares de terrain à Champagnac le vieux, à coté du plan d’eau, il se trouve beaucoup mieux à mener de multiples activités chez lui que pour son employeur.
Comment les rendre lucratives ? Ils sont 4 à la maison maintenant.
Même si, en école d’ingénieur, ses cours d’organisation en entreprise démontraient qu’il fallait se spécialiser pour gagner en efficacité et en rentabilité, Vincent se refuse à ne suivre qu’une seule voie.
Tour d’horizon des activités de lIlo nectar
Le gîte Lilo Nectar
L’extension de la maison qui servait de garage/atelier est transformée en gite. il apprend l’électricité, la plomberie, la menuiserie, le câblage ethernet, l’acoustique… « Avec internet, c’est facile de se former » conclu-il ; il sait trouver les infos, les sélectionner et se les approprier pour acquérir de nouvelles techniques. Au final, C’est une réussite, les locations s’enchainent.
L’apiculture
Dans cette famille on est locavore, sensible au bio, et on consomme de préférence les aliments qu’on a produit soi-même.
Comment remplacer le sucre ? Par du miel, pardi.
C’est à partir de cette idée que Vincent se réoriente sur l’apiculture. Pour pouvoir en vivre il faut 400 ruches, c’est aussi le minimum exigé par la MSA, alors Vincent passe un BPREA, puis se forme auprès de professionnels les formations et se lance avec 200 ruches. Il ne souhaite pas en augmenter le nombre, il aurait l’impression de passer son temps à organiser les transports. Il préfère s’investir dans de l’apiculture faiblement transhumante, augmenter la qualité en entamant une conversion en bio et réfléchit avec Laurine à favoriser au maximum la biodiversité sur place.
Biodiversité à Lilo Nectar
La parcelle de plantes aromatiques et médicinales initiée par l’ancien propriétaire est sauvegardée et développée. Un potager s’étire au sud, en lignes courbes, dans la légère pente devant la maison. Là, c’est l’univers de Laurine. Selon sa volonté, on laisse pousser les arbres dans le champs de lavande pour créer de la biodiversité. Et on y fait pâturer les brebis, picorer les poules. Les abeilles aussi s’en régalent ! Les 700 arbres déjà plantés ne sont qu’un début…
Ce qu’il aime le plus dans son activité d’apiculteur c’est la transformation après la récolte. L’ingénieur bois devient alors confiseur et chocolatier. Dans son atelier, Vincent fabrique du nougat, des pâtes à tartiner, des bonbons, des chocolats, du pain d’épice, de l’hydromel… Et pourquoi pas de la bière ?
La transformation du miel
Ce qu’il aime le plus dans son activité d’apiculteur ? La transformation après la récolte. L’ingénieur bois devient alors confiseur et chocolatier. Dans son atelier, Vincent fabrique du nougat, des pâtes à tartiner, des bonbons, des chocolats, du pain d’épice, de l’hydromel… Et pourquoi pas de la bière ?
La brasserie
La production commerciale de bière n’a pas démarré mais la houblonnière est déjà construite. En contrebas de la maison, apparait un étonnant treillis de poteaux et de câbles métalliques, solidement haubané pour tenir au vent. Des cordes de fibre de coco guident la croissance du houblon. Et l’orge ? Conduire une production d’orge, même sur un seul hectare de surface nécessite beaucoup d’investissement matériel et de travail rassemblé sur une période déjà bien chargé. Avec bon sens paysan, Vincent se pose quelques (rares) limites.
L’atelier-boutique
Pour l’instant, il teste ses recettes de pico-brasseur. Il compte sur l’engouement des clients pour ses produits agricoles, pour le lancement prochain de ses bières. Tout en restant modeste. « Une petite production annuelle de 2000 à 3000 litres me classe dans la catégorie de micro-brasseurs. »
Un bel espace lumineux est dévolu à la maturation du miel, à quelques transformation, et à la présentation des produits au public. Là encore, les présentoirs hexagonaux, clins d’oeil aux alvéoles des abeilles, sont des créations originales, en bois. C’est beau. On imagine que ça doit être agréable de travailler ici. « C’est merveilleux » répond-il.
Des ateliers de découvertes
Toutes ces micro-productions seront l’occasion de présenter leurs démarches à des personnes, qui, comme Laurine et Vincent, sont sensibles à des processus plus naturels.
« En partageant nous avons des retours. Cela ouvre l’esprit, nous donne des idées pour aller vers d’autres projets.
Au lieu de produire plus, partageons plus »
Ce n’est pas donné à tout le monde de lancer à la fois tant d’activités. Il faut être taillé pour. Le super actif tente de minimiser son travail, « j’aimerais en faire moins » dit-il . Mais c’est quelqu’un de parole : « quand je suis engagé, je m’y tiens ». On apprend ainsi qu’en plus de tout le reste, Vincent est sapeur pompier…
Et si il se sent obligé de tout faire lui même il n’y peut rien, (le pauvre) « ça doit être familial, on a à coeur de tout faire nous même ».
On n’arrive pas à les plaindre. Vincent et Laurine sont super occupés, mais leur investissement est tourné avec enthousiasme dans plein de domaines qui les passionnent. On ne doute pas qu’ils vont réussir à tout mener à bien. Et si jamais une activité ne fonctionnait pas, ce n’est pas grave, ils trouveront facilement de quoi la remplacer par une ou dix nouvelles !
Posté par Joëlle Andreys