Le 22 juin 2010
Le vin de pissenlit des Vialettes
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Ils ont parcouru le monde pendant des années et visaient déjà, de l’autre bout de la Terre, le lieu précis de leur retour. Isabelle et Fred savaient ce qu’ils voulaient : ils voulaient vivre là-haut, dans ce coin de Haute-Loire qu’on appelle « le plateau ». Ils voulaient une ferme, un potager, des animaux. Dans leurs bagages, la volonté de vivre dans un environnement naturel, le désir de partager les valeurs d’une vie simple avec des enfants, la recherche d’une autonomie maximale et …une recette qui a un peu changé leur vie : celle du vin de pissenlit de la grand-mère de Fred, originaire du Villaret…
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Isabelle et Fred se sont installés à Champclause, à 1200m d’altitude, face aux Alpes.
Le plateau, en famille…
Quand ils ont atterri à Champclause il y a neuf ans, Isabelle et Fred se sont débrouillés tout seuls. Au début, ils devaient rouler beaucoup pour aller travailler à la ville, mais aujourd’hui toutes leurs activités sont basées à la ferme : Isabelle s’occupe de l’accueil familial d’enfants, « pour leur montrer que des choses simples existent dans le monde« , Fred assure le transport scolaire de la commune, et toute la famille (ils ont deux enfants à eux, bientôt trois) participe à l’activité agricole d’appoint : potager, animaux …et vente directe ou sur les marchés de leur fameux vin de pissenlit…
Quand la poudre jaune colore les doigts, c’est qu’on en a ramassé un bon paquet !
Ah ! ce bon vin de pissenlit !
Isabelle et Fred font leur vin de pissenlit depuis dix ans, en suivant la recette de la grand-mère de Fred. « Au début, on faisait quelques bouteilles pour nous mais, très vite, on nous en a demandé de partout !« , déclare Isabelle. Ils sont donc passés petit à petit de quatre à quarante, puis à quatre-vingt bouteilles par an, pour arriver aujourd’hui à …mille !
« Et ça fait beaucoup de petites fleurs à cueillir !« , souffle Fred en ramenant le dernier seau, si léger, qui pourtant portera le poids total des fleurs ramassées à …62 kg (ça en fait, des seaux !).
Seule la fleur est en effet nécessaire : tout est dans la poudre jaune qui les recouvre. Les prairies dans lesquelles les fleurs sont cueillies sont bien sûr naturelles et exemptes d’animaux : pas d’engrais, pas de pollution animale. « Tous les produits qu’on ajoute dans la fabrication du vin — le sucre, les fruits…, étant bio, remarque Isabelle, on pense qu’on va aller vers une labellisation bio. On n’est pas obsédés par cette labellisation, mais ce serait logique de l’obtenir puisque tout est déjà bio dans notre vin !«
Les étapes de la fabrication du vin
1. (Ci-contre) La cueillette, sur le plateau, a lieu en mai. Il faut attendre le soleil pour que les fleurs soient bien ouvertes, que leur poudre colore les doigts et que la terre soit bien sèche.
2. (Ci-dessous) Les fleurs sont recouvertes d’eau chaude dans une cuve et infusent plus ou moins 24 heures (ça dépend des années).
3. (Ci-dessous) Les fleurs sont retirées de la cuve (elles iront enrichir le compost du jardin). Le liquide qui reste reçoit alors sucre, oranges, citrons, raisins secs… et reste au repos de 4 à 6 semaines. L’évolution du liquide, mélangé matin et soir, doit être surveillée de près.
4. Le moment venu, les fruits sont retirés et le liquide est filtré très finement. Cette opération est laborieuse et délicate : il doit rester le moins de dépôt possible.
5. Le jus, ainsi filtré, retourne dans sa cuve pour décanter quelques jours.
6. La mise en bouteille (ci-dessous) se fait à l’aide d’un tuyau qui tire le jus de la cuve. Le vin devant dégazer, les bouteilles sont bouchées d’abord avec du coton. Le temps de dégazage dépend du temps qu’il fait. Lorsque les bulles ont disparu, les bouteilles sont bouchées définitivement.
En tout, de la cueillette au bouchonnage, la fabrication du vin peut prendre de 12 à 18 semaines. Comme le vin est meilleur après un an en bouteille, Isabelle et Fred ne vendent que les bouteilles de l’année précédente.
L’art du « ça dépend »…
La fabrication, bien que très exigeante, passionne Isabelle : « Les ajustements pendant la fabrication sont différents à chaque étape et chaque année. Tous les sens interviennent dans la recherche du meilleur goût : l’odorat, la vision (pour la couleur), et même l’ouie (pour traquer les bulles à l’oreille !). Depuis dix ans, on a appris à stabiliser la qualité. En même temps, le vin est différent chaque année. En fait, le vin a le goût du plateau : toujours aussi beau, mais jamais le même ! »
Le pissenlit, comme son nom l’indique, a des propriétés diurétiques. On l’appelle aussi dent-de-lion, à cause de la forme échancrée de ses feuilles (en anglais, ça donne « dandelion » !) Il stimule et nettoie foie, reins et vésicule biliaire et soulage aussi les rhumatismes. En fait, c’est un tonique à peu près bon pour tout. Notons que le vin de pissenlit se fait par fermentation (pas d’ajout d’alcool) et qu’il garde donc intacts tous les principes actifs du pissenlit.
Pour répondre à la demande, il faudrait qu’Isabelle et Fred produisent quatre fois plus de vin de pissenlit mais ils ne veulent pas augmenter la production. En fait, sa fabrication fait partie de l’équilibre général de l’ensemble de leurs activités et prend la place qui lui revient, ni plus, ni moins. « Pourquoi vouloir toujours plus ?, déclarent Isabelle et Fred de concert. On n’est pas des écolos extrémistes, mais on fait quand même attention à la préservation de l’environnement, à un équilibre naturel de vie, et c’est dans cette optique que l’on refuse aussi le commerce industriel de notre production. » Ce qu’ils aiment, c’est les marchés, la vente à la ferme, le contact humain avec les gens, la vérité d’une vie simple et partagée. Vous ne trouverez donc pas le Vin de pissenlit des Vialettes – le nom de leur ferme – sur internet, mais vous trouverez toutes les informations nécessaires sur la belle étiquette de leurs bouteilles. Faites-nous confiance (on y a goûté, à Strada !) : le vin de pissenlit d’Isabelle et Fred est absolument délicieux. Conservez les bouteilles debout, et aussi longtemps que vous voulez, même une fois ouvertes, mais attention : leur contenu risque de partir vite, surtout bien frais, en apéro !
Hubert Brunel
Posté par Hubert de BONNEVILLE