Une réflexion globale sur la construction de la maison ce n’est pas pour nous déplaire. Finies les implantations aléatoires, on tient désormais compte de l’orientation, direction le sud. Finies les petites ouvertures des habitats traditionnels de montagne : pour répondre aux exigences de la RT 2012, une maison doit avoir 1/6ème de sa surface habitable en paroi vitrée, enfin de la lumière ! Fini le travail des artisans chacun dans son coin : la RT 2012 prévoit une gestion des interfaces entre les différents métiers et intervenants. Tout cela nécessite une réflexion en amont du chantier sur la mise en oeuvre des matériaux.
Des objectifs, des exigences
La RT 2012 a pour objectif de limiter la consommation d’énergie primaire* des bâtiments neufs à un maximum de 50 kWhEP par m²et par an, modulé selon la localisation géographique, l’altitude, le type d’usage du bâtiment, la surface moyenne des logements et les émissions de gaz à effet de serre pour le bois énergie et les réseaux de chaleur les moins émetteurs de CO2. L’exigence de consommation conventionnelle maximale d’énergie primaire se traduit par le coefficient Cepmax, portant sur les consommations de chauffage, de refroidissement, d’éclairage, de production d’eau chaude sanitaire et d’auxiliaires (pompes et ventilateurs). En Haute Loire, zone H1, la valeur moyenne de la Cmax est de 60 kWhEP/(m².an) dans le résidentiel.
Cette exigence impose, en plus de l’optimisation du bâti exprimée par le Bbiomax, besoins climatiques du bâti, le recours à des équipements énergétiques performants, à haut rendement.
La Règlementation Thermique 2012 est applicable à tous les permis de construire déposés depuis le 1er janvier 2013.
La RT 2012 en chiffres
Un besoin de chauffage réduit par 2 à 3 grâce à l’amélioration de la conception et de l’isolation du bâti
Des performances des systèmes de chauffage améliorées de 10 à 20 % pour le chauffage par PAC, par gaz condensation et par chaudières bois
Réduction de 30% de l’éclairage
entre 2013 et 2020, on vise une réduction de 150 milliards de kWh et de 13 et 35 millions de tonnes de CO2
Une mise en oeuvre délicate des matériaux
La Menuiserie Savel qui a démarré son activité en 1993 en fabriquant des menuiseries bois, s’est toujours intéressée de près aux innovations techniques. En 2005, quand on ne parlait en France que de double vitrage, elle posait à Yssingeaux son premier triple vitrage. En 2012, engagée dans la démarche « entreprise reconnue grenelle de l’environnement», l’entreprise suit régulièrement des formations aux dernières préconisations de techniques constructives performantes. Christiane SAVEL nous fait part de son enthousiasme : Je constate que l’on revient au bon sens des maisons d’antan : peu de percements au nord, on privilégie les ouvertures au sud et à l’ouest. Et on a enfin une réflexion globale sur ce que doit être l’isolation dans une maison ! Ca, c’est une révolution ! Pour ce qui nous concerne, rien de bien nouveau : nous devons maîtriser l’étanchéité à l’eau, l’étanchéité à l’air et veiller à assurer la continuité de l’isolation thermique et phonique au milieu du joint. Il nous faudra surtout faire le tri parmi les nouveaux produits, les membranes et les joints conçus pour le neuf. Pascal Michou de BPSC ajoute : aujourd’hui toutes les menuiseries sont bonnes mais les produits utilisés pour la pose doivent aussi être compatibles avec la RT 2012 : silicone, compribande, joint mousse… et les différentes phases du chantier aussi. Dans la bible de l’ouvrier-poseur, le DTU, les modes opératoires sont scrupuleusement détaillés pour chaque cas de figure : positionnement des pièces d’appuis, pose du joint périphérique, utilisation des silicones, finition extérieure pour un résultat hors d’eau, hors d’air… On y apprend par exemple que s’il gèle ou s’il pleut, la pose des menuiseries doit être reportée à des jours plus cléments à cause des réactions du silicone.
Le propriétaire d’une maison ancienne qui fait changer ses menuiseries ne voudra pas forcément refaire ses embrasures et reposer du papier peint… Il faudra donc faire avec l’existant, gérer l’étanchéité à l’air et à l’humidité à travers des parois hétérogènes… Cela ne va pas être simple à mettre en place et c’est une bonne nouvelle pour les artisans qui seront largement sollicités pour des travaux de rénovation de plus en plus complexes.
Pascal Michou, le patron de BPSC installé à Saint Vincent a anticipé cet nouvel aspect de la demande. « En fin d’exercice comptable, les entreprises décident dans quoi elles vont investir. Certaines refont leur show-room, d’autres investissent dans une nouvelle flotte de véhicules. Moi j’ai misé sur la qualité de pose. » Le groupement Océane auquel il adhère a fait appel au bureau VERITAS pour vérifier et encadrer les procédures adaptées à chaque type de travaux, un label qu’il espère obtenir sous peu et qui demande une qualité irréprochable de travail à toutes les étapes, même administratives : les devis clairs, détaillés, accompagnés de croquis, rassurent les clients.
Mais ce qui devrait faire la différence entre telle ou telle offre, ce sera plus que jamais la faculté de l’artisan à s’associer à d’autres corps de métier.
Ce peut-être en embauchant des spécialistes : « J’ai 15 salariés : plombiers, poseurs, électriciens, plaquistes, cuisinistes, ils connaissent leur métier » insiste Pascal Michou. Et pour cause ! Que l’équipe de pose soit intégrée à la société à laquelle vous achetez vos matériaux est un vrai gage de qualité, alors que des sous-traitances hasardeuses révèlent souvent de mauvaises surprises. Une belle capacité d’adaptation est également appréciable : sur le chantier l’ordre traditionnel des différents intervenants se trouve modifié, il faut savoir se concerter.
La réussite de la RT 2012 n’est pas qu’énergétique, elle incite à de l’intelligence entre les corps de métier.
ILS EN DISENT
« Fait ch… la RT 2012. On complique encore les choses. L’habitat coûte de plus en plus cher, et ça n’aide pas les couples de petits jeunes à 2000 euros par mois de revenus à se loger. C’est comme les prêts à taux zéro, on les accorde à ceux qui ont les moyens d’acheter du BBC, pas à ceux qui ont peu de moyens et besoin d’un logement.» Ded’s
« On avait choisi un bon fabricant, on était sûr de son sérieux… mais quand on a vu arriver des poseurs en 205 toute cabossée avec des outils qui dataient de la dernière guerre, on a été sacrément refroidis. Et vous auriez vu le chantier dans la maison ! « Maryse
« Les boules. Investir 30 000 euros dans de nouvelles fenêtres pour se cailler, parce qu’elles n’ont pas été posées correctement. » Mickaël
Identifier, quantifier et détruire les flux d’air indésirables
« Quand on met 50 pascal dans une maison, on voit tout de suite si l’étanchéité est bien faite ou pas » . Le test d’infiltrométrie, ou test de la porte soufflante, Blower-Door® – qui consiste à mettre la maison en dépression puis en surpression, est diablement efficace nous explique le diagnostiqueur d’Audit Construction, on arrive à voir l’air qui passe dans mes nervures des équerres de fixation entre la menuiserie et le bâti. Frédéric Marmorat – de Tendances Energétiques, société de Coubon, spécialisée dans la réalisation d’études thermiques – confirme : En construction ou en rénovation ce test est un complément idéal à l’étude thermique pour réaliser de véritables économies de chauffe. Il permet d’identifier l’emplacement des fuites d’air qu’on souhaite faire disparaître afin de réaliser une étanchéité correcte.
Qui n’a pas vu des prises électriques laisser passer l’air de manière importante ? Les liaisons entre les matériaux donnent souvent lieu à de petits défauts d’étanchéité. La somme de ces déficiences peut être équivalente à un trou de la taille d’une feuille A4 dans un mur de votre maison. Ouvert 24h/24 et 365 jours par an, imaginez la puissance de chauffage gaspillée… cela peut représenter une part non négligeable de la facture de chauffage tous les ans.Typiquement, ce qui ressort le plus souvent des tests, c’est la déperdition par le passage de gaines. Cela arrive quand le tableau électrique est placé par exemple dans la cave ou au garage. Du coup il y a communication entre la zone protégée et la zone non étanche, via toutes les gaines électriques. Une installation de plomberie risque elle aussi de perforer la couche d’étanchéité, tout comme une rénovation de menuiserie mal mise en oeuvre.
Au dépot de la demande de permis de construire, la RT 2012 exige la réalisation d’une étude thermique prévisionnelle. Un test intermédiaire identifie les fuites, permet de remettre éventuellement en question le process constructif, de traiter rigoureusement quand il est encore temps les ponts thermiques et l’étanchéité à l’air. Le test final, si positif, aboutira à la délivrance d’une attestation de prise en compte de la réglementation thermique pour l’obtention du label BBC Effinergie.
En Haute Loire à ce jour, 2 opérateurs sont agréés pour faire les tests d’infiltrométrie ; audit construction et CB2L. (annonces ci dessous) La liste des diagnostiqueurs sur www.rtbatiment.fr.
ET AUSSI
Cyril Boudon CB2L
En cumulant les interstices d’une habitation, on obtenait environ la taille d’un ballon de basket. J’ai calculé que ça donnait environ 600 € de consommation énergétique qui partait en courant d’air. Aujourd’hui avec la RT 2012, on nous demande de ne pas dépasser la taille d’un ballon de hand.
Christiane SAVEL
Je suis pour plus d’exigence. On nous dit que le BBC va devenir le standard du marché. Mais il y a le BBC français et le BBC allemand. En France nous sommes dans la demi-mesure : nous nous contentons d’un seuil de perméabilité à l’air de 0,6m3/m2.h alors que celui de la Passiv Haus est de 0,16. Autre élément qui nous distingue de l’Allemagne, notre consommation en énergie primaire : dans nos 50kW/m2.an, nous ne tenons pas compte de l’énergie domestique (four, lave linge, lave vaisselle…) On pourrait aller plus loin.
Posté par Joëlle Andreys